Mardi 3 septembre

Rentrée des niveaux auxquels je ne fais pas cours. Je passe donc la journée à bucher, imprimer, photocopier, plastifier. Tentative, comme tous les ans, de créer des règles d’organisation et de cohérence.

Pas pour les mômes. Pour moi.

Je vais être très prétentieux : je pense donner l’impression d’un prof carré dans sa façon de mener ses cours. J’en ai eu des témoignages de la part d’anciens élèves. Alors que la partie de mon cerveau qui s’occupe de ma vie professionnelle ferait du bureau de Gaston Lagaffe un appartement-témoin Ikea. Et c’est quelque part assez épuisant. Sans cesse ça se modifie, ça évolue, ça bouillonne, jusqu’au moment où, pris par le temps, il n’est plus possible de réfléchir et je me retrouve à mettre en documents de travail et en diaporama quelque chose que je trouverai forcément mal abouti, incomplet, parcellaire. Le mieux est certes l’ennemi du bien. Mais il y a quelque chose de vertigineux – même si ça, aussi, c’est prétentieux – à enseigner des éléments qui, pour certains, resteront à l’esprit des élèves pour une bonne partie de leur vie. Le nombre d’adulte qui se servent, pour calculer, conjuguer ou se repérer d’astuces données à l’école primaire ou au collège est immense.

Bref, mes pensées tournent comme des écureuils en cage. Alors que je n’aspire à rien d’autre que de faire de mes cours un moment de sérénité. Comme si je devais acheter ce calme au prix d’une angoisse permanente. En cinquième – au collège, donc – j’avais adoré frisonner en lisant Le Mystère du lac, de Robert Mac Cammon. Mais au-delà des mystères de la ville de Zephyr, une phrase m’avait marqué. Celle dans laquelle le narrateur explique que l’angoisse de sa mère est une aiguille avec laquelle elle coud une réalité toujours mouvante.

Je ne pense pas agir autrement en tant qu’enseignant.