Du côté de chez Platon

Attention, préparez vos meilleurs logiciels de capture d’écran. Ceci sera un billet politique et philosophique. Cela risque d’arriver une fois dans l’histoire de ce blog et promis, je vais essayer de ne pas vous gonfler. Je précise à toutes fins utiles que je ma culture politique pourrait être résumé au dos d’un paquet de pépitos (petit format) et que je fais simplifier à outrance. Vous êtes prévenus.

Que même on va parler de lui.

On pourra me demander à juste titre pourquoi je me prends pour Christophe Barbier, ce à quoi je répondrai par une solide bordée d’injures et aussi parce que j’ai très envie d’y voir clair. Ces derniers temps, on nous presse par l’intermédiaire de divers médias d’avoir une conscience citoyenne. De mettre notre bulletin dans l’urne afin de participer au redressement de la France, à sa renaissance, cocorico et odeurs de basse-cour en option.

Ces derniers temps, tout le monde parle politique.

Politique, le mot est lâché.

J’aime bien les mots. Aussi je suis allé creuser un peu plus loin, histoire de réactiver d’antiques souvenirs de lycée et de prépa.

La politique, l’un des premiers à en avoir parlé est notre bon vieux Platon, qui est à la philosophie ce que Gainsbourg est aux chanteurs français : une référence que l’on aimerait bien ringardiser mais qu’on n’arrive pas à dépasser (et vu la qualité de ce qui passe actuellement à la radio, c’est mal barré d’ailleurs).

Que nous dit Platon donc ? Que la politique est l’ensemble des moyens mis en oeuvre pour gérer les affaires publiques. Les affaires concernant donc tout le monde.

Je ne sais pas vous, mais je trouve qu’au cours des siècles, il y a eu comme comme un petit décalage qui s’est installé. Alors certes, gouverner un pays de plusieurs millions d’âmes, c’est autre chose que de s’occuper de quelques milliers d’abrutis en toge blanche (je vous avais dit que je simpliferai à outrance).

C’était seyant, ceci dit.

Mais j’ai l’impression qu’on a un peu perdu le sens du mot. On ignore où commence et où s’arrête la politique : légiférer sur la fermeture ou non d’une usine de lacets de chaussures constitue-t-il une action politique ? Décréter qu’une cellule familiale doit de préférence comporter un papa, une maman et x nombre de chiards est-il de la compétence politique ?
Je pense que c’est une peu le bâton merdeux des responsables de notre beau pays actuellement : leur champ d’action est devenu si vague, si mal délimité que nous, les administrés, attendons un peu leur avis sur tout, tout en gueulant dès que nous nous sentons agressés dans notre intimité (je ne parle pas d’une perversion sexuelle quelconque, je précise). Difficile, dans ces circonstances, de bâtir un programme politique qui satisfasse tout un chacun.

Après ces charmants petits préliminaires, passons à la grosse blague de Platonounet qui n’était pas le dernier pour la déconne : d’après lui, le but de l’État (au sens de l’organisme à qui nous déléguons la charge de la politique) est d’instaurer une société juste et de faire régner la Vertu.
Prière d’attendre avant d’exploser de rire, ça devient encore meilleur maintenant. Comment définir la Vertu en politique ? Il la définit en quatre principes :

– La sagesse qu’il dit être l’amour et la recherche de la connaissance. Un pays est vivant, en évolution. L’État aurait pour mission de faire en sorte que nous nous améliorions. Que nous devenions des êtres plus sages.

Je ne sais pas vous, mais l’enseignant en moi se tord de rire. On connait mes opinions sur l’état de l’éducation des enfants actuellement. Mais on pourrait étendre cette plaisanterie aux adultes. Une fois le parcours scolaire de chaque citoyen terminé, il est lâché dans la nature avec ses petites mimines et plus jamais on ne cherchera à étendre sa connaissance. Non. La connaissance c’est tout périmé, on l’a aujourd’hui remplacé par les savoir-faire. Le fait de pouvoir effectuer une tâche précise efficacement. Parce que ça, c’est utile, ça permet d’assurer un emploi et la boîte de conserve quotidienne. C’est pas avec la « connaissance » qu’on va relever l’économie.

– Le courage, qui est la force morale : je ne suis pas persuadé qu’un peuple doué de force morale est tout ce que recherche un gouvernement, quel que soit son obédience politique. Un peuple doté de cette qualité, ça bouge, ça s’interroge, ça conteste, et ça refuse pas mal de compromissions. Or, les compromissions sont devenus le fondement de toute action politique moderne. Difficile de la ramener devant certains pays au sujet des Droits de l’Homme quand on a des A380 à leur refiler.
De la même façon, traiter un dictateur avec tous les égards est envisageable s’il nous permet de creuser des troutrous dans son sol histoire d’en extraire du pétrole.
Alors certes, les principes ne remplissent pas plus des ventres vides que des caisses exsangues… Mais étrangement, je me demande si un label « politique équitable », comme le commerce, ne connaîtrait pas un certain succès…

– La tempérance, qui est le fait de dominer ses passions : oui alors là, je vous demande d’allumer votre poste de télévision en période de débat électoral. Les coups de sang sont devenu le signe du candidat qui a des couilles, qui ne se laisse pas faire, bref, un candidat qu’est pas un pédé quoi !
De la même façon, on a rarement autant encouragé l’ambition dans notre société, à telle enseigne que le terme « se contenter » frise aujourd’hui l’insulte. Je ne sais pas vous, mais je ne trouve pas honteux de me plaire dans une position qui n’est pas la plus haute possible, si j’ai eu la possibilité d’en choisir d’autres auparavant.
L’impulsivité est désormais une qualité suprême. Mais c’est dangereux, l’impulsivité. On peut dire n’importe quoi, comme, par exemple, sortir de grosses conneries sur les civilisations ou le nazisme. C’est pas grave, c’était « sous le coup du moment ».

– La justice sociale, à savoir assurer à chacun une place selon ses capacités : à nouveau, je dois avouer avoir un peu de mal à prendre ce concept au sérieux. Entre les sans-emplois, sans-domicile, sans-papier, combien sont-ils à tomber entre les mailles du filet ? Obtenir sa place dans la Cité, dans le pays, n’est plus aujourd’hui un du. C’est une chance, un privilège, qu’il devient de plus en plus difficile de perdre.

Alors on me répliquera, à la conclusion de cette (mauvaise) dissertation de bachelier, que la gestion des problèmes au quotidien laisse peu de place aux grands idéaux. C’est peut-être là notre principal problème : notre politique n’est aujourd’hui plus que gestion. On n’est plus dans la République, mais dans Sim City. Construisons ici, détruisons là, bougeons les curseurs des taxes, de toutes façons, les petits bonshommes crées par l’ordinateur continueront leur petit défile sur les autoroutes. Mais je me dis aussi que c’est vachement élastique, les grands principes. Que je me demande si on ne peut pas, au quotidien, faire entrer un peu de sagesse, de courage, de tempérance et de justice sociale dans un énième amendement, proposition de loi ou plan d’étalement de la dette. Juste pour voir.

(Oui, la cité idéale, ça fait un peu penser à ça en fait… (et bien sûr, offrande aux bronies qui m’entourent, non, je ne serai jamais des vôtres))

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