Mardi 20 septembre

Je ne sais pas si le supplice de la douche écossaise a historiquement existé. Mais l’idée que je m’en vais ressemble, psychologiquement, à ce que semblent vivre pas mal d’élèves qui disposent d’une AESH : une adulte (car je n’ai encore jamais vu d’AESH homme) les aidant en fonction de leurs particularités d’apprentissages. Certaines les aideront à écrire, d’autres reformuleront des consignes, d’autres, encore, gèreront les émotions de mômes dépassés par ce qu’ils se prennent dans la tronche.
Mais pas tout le temps.
Parce qu’une AESH, ça coûte cher, n’est-ce pas, malgré des salaires dérisoires au vu du travail effectué. Des AESH, on ne va pas en recruter pour tous les élèves qui en ont besoin. On va leur permettre de rester une poignée d’heures avec les élèves. Et après, elles partiront en voir d’autres, pour encore quelques heures.
C’est le cas pour Simon.
Simon a, en première heure de français, participé. Lute, son AESH, lui soufflait régulièrement de reprendre son stylo, l’encourageait lorsque son attention flanchait. Lui souriait discrètement, ou le reprenait lorsqu’il feignait de ne pas vouloir bosser. Jamais lui donner la solution ou lui aplanir les difficultés. Juste lui permettre de se mettre au même niveau que les autres. Simon souriait, il a vite compris ce que Molière voulait dire, avec Martine qui préparait sa vengeance.
Et puis Lute est partie. Et Simon m’attrape par la manche. “Je comprends rien.”
Je reste quelques minutes avec Simon. Il me sourit. Lumière, à nouveau, dans ses yeux. Mais Simon n’est pas tout seul, il y en a beaucoup d’autres qui ont besoin de moi. Et il serait injuste que je les laisse seul. Alors Simon sombre doucement. Et sort du cours sans me dire au revoir. Les pages du cahier toutes de travers.
“Monsieur !”
Je tourne la tête des papiers que je rangeais. Par la porte, une petite tête.
“Pour le travail d’écriture, je peux mettre Lute en héros ?
– En héroïne. Il doit se passer au XVIIe siècle, votre texte.
– J’aimerais bien, monsieur.”
Allez…