Lundi 5 décembre

Lorsque je rentre à la maison, certains soirs, j’en ai les oreilles qui résonnent, de ce “monsieur”. Mon pseudonyme sur les réseaux, Monsieur Samovar, fait souvent hausser le sourcil à cause du deuxième terme. Or le premier me semble parfois plus incongru.
“Monsieur” quand tu es prof, de genre masculin, c’est le mot que tu entends sans arrêt. Tellement de sens. Tellement d’intonations. La polysémie à son paroxysme.
“Monsieeeeeeeur ?” La patience de l’élève qui s’épuise. “MONSIEUR”, la question importante. “Monsieur ?” L’appel à l’aide. Et tant d’autres.
Si parfois mon cerveau tangue, si mon corps s’épuise, c’est que ces appels me projettent chacun dans une réalité différente, celle du môme qui prononce le mot.
“Levez la main, je vous vois très bien, pas besoin de m’appeler.”
Peine perdu. Toutes et tous voisent leur “Monsieur” quel que soit l’année, le niveau, la période.
“Attention à la pédagogie de garçon de café”, m’a-t-on un jour recommandé, à savoir le fait de se déplacer de table en table pour tenter de servir chaque élève. Mais il n’y a pas besoin de se déplacer physiquement. Le “monsieur” d’un élève te force à basculer sur son mode de questionnement, sa façon de penser, de s’exprimer. Afin de comprendre comment l’aider.
Je suis Monsieur. Ça veut tout et ne rien dire.