Mercredi 28 décembre

Au seuil des vacances de Noël, Luc m’a balancé ce secret, intime. Quelque chose qui n’a rien à voir avec l’école.
Ça n’est pas la première fois. En quinze ans, des secrets de ce genre, j’en ai accueilli plusieurs. Au début, comme un débile, je me suis rengorgé en y voyant une marque d’élection. Puis je me suis mis un coup de pied aux fesses (ce qui nécessite une certaine agilité, ne nous mentons pas) : ces mots chuchotés sont trop précieux, trop importants, trop graves pour que tu en fasses ton miroir.
Et la règle numéro un : ne jamais rester seul avec. Oui, la première règle est une trahison. En parler. Dans le milieu professionnel ou privé, trouver quelqu’un avec qui réfléchir. Parce que, quelque part, ça n’est pas “normal” que l’on soit forcé de faire d’un enseignant le dépositaire d’une partie essentielle de sa vie personnelle. Parce qu’il est facile de ployer sous ce fardeau. Parce que faire le mieux, quand on est ébloui par la lumière de l’intime, ça peut être compliqué.
Trouver quelqu’un de confiance. Et se dire – j’ai eu du mal à l’apprendre, c’est sans doute moi, peut-être pas – que ça n’est pas un honneur, ce genre de secret : c’est un danger. Un danger dont il faut prendre le plus grand soin.
Je ne sais pas encore ce que je ferai de ton secret, Luc. Mais je regarde ma main sous tout ses angles. Et je réfléchis à comment te la tendre.