Mardi 24 janvier

S’il est un conseil que je donnerais volontiers à un collègue entrant dans le métier (et avec lequel il aurait le droit de récurer ses toilettes, nous sommes d’accord), ce serait le suivant : ne prends jamais personnellement l’échec d’un cours.

Prenons l’exemple de ce matin. La même heure sur la poésie pour les deux classes de sixième. Je leur ai demandé de ramener dans leurs devoirs les trois mots qu’ils aiment le plus, et les trois qu’ils aiment le moins. Dans la première, on rigole. On saute de cucurbitacée en tam-tam en passant par une loutre ou un avorton. Les mômes saisissent à vitesse grand V. “C’est trop bien, on n’a même pas besoin de comprendre !”
Et pourtant si, ils comprennent. Sortent du cours avec ce concept primordial : la poésie, c’est faire résonner les mots d’une autre façon.

Heure suivante, dans laquelle j’entre en toute confiance. Et qui s’avère glaçante. Quelques petits essais, un peu tristes “J’aime bien "foot”. Tu sais pourquoi ? Ben non.“
Aucune mauvaise volonté. Aucune envie de mal faire. Juste, ça ne prend pas. Ils étouffent mal leurs bâillements. Ces sixièmes sont habituellement les plus lestes, pourtant. Les plus curieux et les plus drôles. Là, ils s’ennuient ferme et moi aussi. On écourte cette découverte pour analyser un calligramme qui leur plaît beaucoup.

Cet aléatoire absolu, tissé de mille raisons (façon de présenter l’activité, fatigue, ce qui a pu se passer l’heure précédente…) m’a longtemps terrifié. Aujourd’hui, j’apprends à l’accepter. Nous enseignons sur du sable. En bon Fremen, je tente de glisser dessus.

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