Lundi 13 mars

“Bon ben on va arrêter ici, j’en ai marre.”

Je n’ai pas prononcé cette phrase à la suite d’une heure de cours qui s’est mal passée ou dans une activité sabotée, mais pendant le club de jeu de rôle. Les mômes roulent des yeux, effarés.

“Mais monsieur, on joue !
– Non. Vous faites n’importe quoi.”

En effet, dans ce tout début de campagne, le groupe s’amuse à saccager le manoir dans lequel il se trouve, à se moucher dans les rideaux et péter sur les canapés. Bref, ils ont envie de saccager.

“J’ai préparé une histoire à raconter avec vous, mais si vous ne voulez pas aller plus loin, j’arrête là.”

Silence contrit. Ce sont des moments que je déteste. Ces moments où “je tape sur la table parce que c’est moi qui sait ce qui est bon pour vous.”

Mais le fait est que je sais. Ce scénario de l’Appel de Cthulhu, je l’ai raconté à d’autres personnes, à mes amis. Et je sais qu’il est capable d’attirer de grands débutants dans un autre monde, sombre et fantastique. Je soutiens les regards d’ados blasés. Avant de tomber sur celui de Nils. Serein, approbateur.

“Oui, on est sérieux, j’ai envie de jouer, moi. Vous me gonfler à faire n’importe quoi.”

Alors on continue, un peu navrés, tous. Jusqu’à la gare de Boston, direction le village perdu dans les bois de Green Mountain. Ils commencent à se demander ce qu’il se passe. Pourquoi la fille a disparu, quels sont ces coups de feu à l’autre bout du district. Et j’insiste pour qu’ils s’appellent par les noms de leurs personnages. Tout doucement, mutatis mutandis, ils s’incarnent. Et commencent à être, plus seulement à jouer.

Il est des histoires, des fictions qui méritent le respect. Et même dans le club de midi, il faut en être conscient.

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