Vendredi 24 mars

“Monsieur, la CPE elle nous a dit de venir vous voir et de nous excuser.”

D’énormes larmes roulent dans les yeux des deux sixièmes qui sont venus m’interrompre dans ma consommation quotidienne de Ricoré à la récréation (arrêtez de rigoler, je tente de diminuer le café… J’ai dit arrêtez de rigoler !)

“Allons bon. Que se passe-t-il ?
– On… On s’est… hic… on s’est enfermées dans les toilettes.
– Ah ?
– Et… Et on a renversé du savon par terre et on l’a étalééééééé.”

Grandes eaux. Et là, j’ai approximativement quatre secondes pour savoir comment réagir devant ces deux gamines dont je suis le professeur principal. Et je n’ai pas la moindre idée de la réaction à adopter devant cette affaire de salon étalé par terre par pure malveillance.

Je bafouille un truc absolument nul sur le fait d’agir sur un coup de tête, qu’il faut tenter de se tirer vers le haut, pas vers le bas, mais qu’elles apprennent ce que ça veut dire d’assumer ses erreurs et que ça s’est bien. Je me consume de honte devant l’inanité de la réplique.

Des situations comme ça, il y en a dix par jours quand on est prof. On ne gère pas que du sublime ou de l’effroyable. Parfois, de l’incongru. Des scènes improbables dont il nous manque les tenants et les aboutissants, voir même une partie essentielle. Des scènes peut-être anodines, peut-être essentielles sur lesquelles il faut réagir au quart de tour. Une vraie descente de piste noire.

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