Mardi 12 septembre

Résumons.
Je suis remplaçant (TZR, pour parler acronymes de l’Éducation Nationale).
Pour la première fois dans en lycée (si l’on excepte une brève incursion il y a deux ans).
Au service partagé entre deux établissements.
Systématiquement affecté dans des salles différentes.
On ne va pas mentir, ce ne sont pas des situations d’enseignement éminemment confortables. On m’a rarement autant appelé “Excuse-moi comment tu t’appelles ?”
Pourtant, cette situation ne me déplaît pas. Alors que d’habitude, je suis le mec qui a besoin de s’investir dans mille projets, de s’inscrire au conseil d’administration, au conseil de vie lycéenne, de participer à collégiens / lycéens / grands-parents au cinéma, cette année, ça n’est tout simplement pas possible. Quand on ballote d’un établissement à l’autre, et que l’on retente un concours, il faut accepter que cette fois, on ne sera pas une sorte de mascotte poilue de la salle des profs.
Arriver quelques minutes avant la sonnerie plutôt que trois quart d’heures. Pour retrouver, finalement, celles et ceux qui m’ancrent. Les élèves. Avec qui, petit à petit, se construit la patiente géographie de notre territoire commun. Ils commencent à sourire à certaines de mes maladresses, me dévoilent ce qu’ils apprécient dans le cours : les figures de styles un poil exotiques – vive l’épanorthose – les travaux de groupe, les anecdotes croustillantes sur la création d’un bouquin. Doucement, les questions commencent à affluer, les voix s’attarder à la récréation. “Vous avez déjà lu La ferme des animaux ? J’ai détesté ! À la place, je lisais Bonjour Tristesse !”
Et leurs visages, leurs voix, leurs noms s’inscrivent dans mon esprit.
Ça c’est solide.
Ça c’est stable.
Ces grandes silhouettes, qui m’impressionnent encore, me rassurent également. Cette année les murs sont mouvants. Alors on fixe sa boussole sur les regards.