Mardi 3 octobre

J’ai dû parler une trentaine de minutes avec S. depuis le début de l’année scolaire. À la pré-rentrée, nous avions sympathisé autour d’un terrain de badminton et depuis, rien. Les emplois du temps, le va-et-vient incessant entre les bahuts…

Aujourd’hui, je me pose à côté de lui en salle des profs. Il est un peu en retrait, l’air contrarié. Ça se passe moyennement bien avec une classe de seconde ; il n’a pas l’impression d’avancer. Gros doutes : ceux que connaissent énormément de collègues qui commencent dans le métier. Sans trop attendre, j’applique le pansement premiers secours qu’on m’a appris à déployer dans ces circonstances :

« Si tu es ici, c’est que tu es légitime à l’être. »

Ça n’est pas qu’un baume pour contusions à l’ego. C’est une croyance fermement ancrée. À partir du moment où, quelle que soit la raison, on a décidé d’enseigner, on a le droit de tenter sa chance. Quel que soit son parcours, ses compétences, ses forces et ses faiblesses. Une fois dans ce boulot, ne comptent plus que les actes devant les élèves, et notre propension à tenter de nous améliorer. Je ne suis pas naïf : je sais parfaitement que mon propre chemin y est pour beaucoup. Je sais que je cherche à émuler toutes ces mains qui se sont tendues, les premières années, pour m’aider, alors que j’étais absolument incapable d’aligner trois minutes en classe sans commettre une bourde pédagogique ou didactique.

Mais il y a plus.

Notre métier se tisse du chaos. Chaque année un peu plus. Au fil de réformes qui tricotent et détricotent, d’un statut de plus en plus flou, et d’un domaine de compétences qu’on veut toujours plus vaste. Si tu te lances dans cette grande et terrifiante aventure, que tu sois déjà un pédagogue aguerri ou un néophyte maladroit, tu mérites toute l’aide, le soutien, et la force possible. Il n’y a que comme ça qu’on préservera ce qui peut l’être encore.

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