
Cela va faire 17 ans que je suis passé par l’IUFM, l’un des très nombreux avatars de ce qui sert à former les enseignants. (Ça change tellement souvent de nom, de modalités et de programme qu’on pourrait en faire toute une saison de Pokémon). Ce qu’il m’en reste ? Des phrases, qui de temps en temps me reviennent en mémoire.
« Si vous voulez compter pour vos élèves, il vaut mieux être professeur des écoles. »
Je me demande quelle était l’intention derrière cette étrange sentence. Peut-être une invitation à nous protéger. La formatrice qui nous a dit ça avait un côté très maternant. Un avertissement : réussir à ne pas faire de notre rapport aux élèves un « enjeu personnel ». Un verdict un peu condescendant face aux collègues PE ?
Est-ce que je compte pour mes élèves ? Je n’en n’ai pas la moindre idée. Si ces années d’enseignement m’ont appris quelque chose, c’est que tenter de percer leurs pensées ou leurs attitudes est souvent peine perdue. Ils ne retiennent jamais ce à quoi on s’attend, leurs épiphanies arrivent à rebours de toutes nos attentes.
« Chanter c’est lancer des balles », disait une chanson que mes parents écoutaient souvent en voiture. Enseigner aussi. Ne pas savoir où vont retomber nos paroles, nos tâches que l’on a passé des heures à peaufiner. Mais continuer à lancer, sans arrêt. En espérant que quelque chose touche au but.
Et résonne. L’idée, ça n’est peut-être pas de compter pour eux. Mais de faire compter les moments passés ensemble.
C’est marrant, c’est une conversation que j’ai eue avec la psy, y’a pas longtemps : mon désir mal placé de reconnaissance et le fait que ça me foute le bourdon de ne pas avoir la moindre idée de l’impact que ça a, ce que j’essaie de faire… 🙂
Kalys
Je ne suis pas sûre qu’on compte tant que ça pour nos élèves. Je suis PE et je pense qu’on est surtout des balises ou des phares (un mot très à la mode en ce moment avec son h majuscule) dans leur voyage scolaire, un repère pour un temps (une année ou deux me concernant) avant de passer à un autre repère et de continuer sa route. On peut avoir cette impression d’être important pour eux surtout chez les plus petits qui sont plus démonstratifs, on passe 6 h par jours avec eux donc oui on a une place importante dans leur vie à cet instant là mais ça ne dure pas et ça ne veut pas dire qu’ils se souviendront de nous d’une manière particulière. Enseigner c’est aussi semer des graines sans savoir si elles germeront ni comment et avec quelles conditions mais continuer à tenter de semer et quand ça germe prendre soin de cette pousse pour qu’elle s’épanouisse du mieux possible.
Arone