
L’année dernière, j’avais « ma » salle. Celle dont je ne ne bougeais pas. Que j’avais aménagée. Bibliothèque, calendrier, classeurs de ressources. C’était plus simple. Pas « confortable », comme j’ai pu l’entendre dans la bouche de certains – une salle attribuée à un enseignant c’est un « petit confort », on le prononce la bouche tordue – mais plus simple pour faire entrer les élèves dans ce monde si particulier. Parce qu’il faut se rendre à l’évidence : non, ça ne va pas de soi de se dire que, pendant 55 minutes, les fonctions des propositions subordonnées vont constituer l’essentiel de nos réflexions.
C’est la difficulté cette année : je suis baladé de bahut en bahut, de pièce en pièce. Et faire entrer des ados, fussent-ils presque adultes dans un monde de mouvements littéraires et d’explications linéaires en comptant sur sa posture, sa voix, et un vidéoprojecteur qui fonctionne quand il en a envie, ça n’est pas facile.
C’est un peu écrasant, même. À chaque fois, recréer un univers mental, une projection de tous ces concepts abstraits. Les Labdacides de Cocteau, le vide entre les mots d’Hélène Dorion, les subtilités de la négation.
Chaque heure, recréer son petit monde. En espérant qu’il soit assez grand pour accueillir trente-cinq élèves.