Samedi 14 septembre

Julia ne comprend pas.

Julia ne comprend pas ce qu’il faut écrire, où il faut aller s’asseoir, de quoi parle le texte, ce que raconte l’activité. Julia ne comprend pas tout le temps et en permanence.

« Je ne comprends pas, monsieur.
– Vous avez lu la consigne ? »

Elle n’a pas lu la consigne. L’incompréhension de Julia, c’est son mode de communication. Parce qu’elle a besoin qu’on vienne la voir. Qu’on s’assoie où s’accroupisse à son niveau, qu’on lui explique. Julia a besoin qu’on s’occupe d’elle. Et en fait, il s’avère qu’elle avait déjà compris.

J’ignore à quoi ressemblait sa classe de primaire, si ça a toujours été dans son caractère, ou si son entrée en sixième a déclenché cette façon d’être. Mais c’est un long et laborieux apprentissage qui commence. Celui de l’autonomie. Accepter que l’enseignant ne soit pas toujours au plus près. Qu’il y ait toujours un peu de distance. Se faire confiance aussi.

Bien entendu, je me le dis en tant qu’enseignant. Mais c’est une limite fine à observer, entre la volonté de les émanciper et la négligence. Ne pas non plus totalement se désintéresser d’elle ou l’envoyer bouler lorsque, pour la quatrième fois en une minute, elle lève la main pour dire qu’elle ne comprend pas (il n’y avait rien à comprendre). C’est encore et toujours une question de distance. Nous passons notre temps, en tant qu’enseignants, à ajuster des curseurs. Quant à la difficulté de nos cours, notre proximité ou non avec nos élèves, notre sévérité, le temps passé à expliquer, à les mettre en activité… Et finalement, on ne parviendra jamais à avoir la bonne distance avec absolument chaque élève.

J’espère, cette année, donner à Julia ce dont elle a besoin. Tout en sachant très bien que je ne suis qu’un des multiples personnages dans le tableau de sa confusion.

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