Mercredi 18 septembre

Comme tous les mercredis matin en première heure, j’ai cours avec les cinquièmes Astronelle.

Et comme tous les mercredis matins depuis le début de l’année, Yan est là. Alors qu’il ne devrait pas. L’emploi du temps de Yan est allégé, du fait des disponibilités de son AESH, mais également de sa fatigabilité. Et lorsque Yan est fatigué, c’est compliqué. Il parle tout haut, part au quart de tour, pour la plus grande joie de certains de ses camarades, qui savent très bien qu’il leur suffira d’une grimace pour le voir se lever, se mettre à lancer des trucs ou à crier, et permettant donc de faire une pause dans l’exploration des histoires de Guy de Maupassant.

Et pourtant, Yan vient à chaque fois.

« Mais si, je dois être là ! » proteste-t-il très fort me mettant – littéralement – sous le nez son carnet de correspondance, dans lequel il s’est rajouté des heures de français au crayon à papier.

Il y a quelques années, je me serais bêtement rengorgé devant ce que j’aurais pris pour un signe d’élection. Aujourd’hui – et je ne pense pas que ce soit beaucoup plus fertile – je me retrouve coincé dans une aporie. Parce qu’accueillir Yan en classe, sous couvert de la direction, c’est certes lui offrir un refuge dans laquelle il se sent apparemment mieux que chez lui.

Mais pour faire quoi ?

On a beau souvent me traiter « d’assistant social » sur les réseaux (étrange insulte), je me demande ce que je lui apporte. Dans les bons jours, Yan parvient à recopier avec beaucoup d’erreurs une partie du cours. Il me donne, à l’oral, quelques réponses à des questions sur les textes, mais je n’ai guère de temps à lui consacrer, lorsque vingt-deux autres mômes demandent de l’attention. Que puis-je faire pour Yan ? Lorsque je feins de ne pas remarquer qu’il ne devrait pas être là, est-ce par altruisme ou par lâcheté, ne souhaitant pas me mettre en conflit avec lui ?

J’aimerais lui trouver une place. Et pour le moment, je n’y parviens pas.

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