Samedi 21 septembre

Le vendredi soir, de 16h à 17h, c’est Vie de classe avec la sixième Evoli. Et je crois que je vais détester cette heure.

Non pas parce que les sixièmes Evoli sont désagréables, bien au contraire. Ce sont des sixièmes, avec tout ce que ça implique de totalement choupinou, et de nécessité de répéter environ sept mille neuf cent dix-huit fois l’intégralité de ce qu’on leur dit.

Le problème, c’est que je n’ai plus la place. Où ? Je l’ignore. Depuis que je fais ce métier, j’ignore où se loge cet espace mental dans lequel j’accueille, à longueur de journée, les mômes. Leurs angoisses, leurs histoires, leurs questions, leurs difficultés, leur enthousiasme.
Je disais l’autre jour à ma sœur que la différence entre un introverti et un extraverti est peut-être que ce dernier tire son énergie des autres et non de lui-même. Tous les tests des magazines et des applis gratuites le confirment : j’appartiens au peuple des extravertis. Connaître mes élèves, tant dans leurs apprentissages que dans leur personnalité m’enthousiasme. Et c’est probablement la raison pour laquelle je ne recherche pas activement d’idées de reconversion professionnelle.

Mais, lorsque nous sommes vendredi, que mes pensées ont été saturées, cinq jours durant, de dizaines d’histoires différentes, de visages et de problèmes, j’ai la sensation qu’il ne reste plus rien à consumer. Où que je me tourne, il n’y a plus rien d’autre que M. Samovar, cette foutue persona de prof, et les mômes.

H. semble avoir disparu. Les kilomètres de course à pied qu’il s’envoie, les bouquins qu’il lit, le jeu qu’il est en train de poutrer, tout ça n’est plus qu’un lointain souvenir. Peut-être que ce n’est qu’un mirage, au fond. Une illusion que j’entretiens pour ne pas définir péter un plomb.

C’est une sensation qui ne dure pas longtemps. De 16h35 à 17h00 à peu près, le vendredi. Dès que j’aurai passé la porte, elle s’évanouira. Je retrouverai les miens. Je téléphonerai à ma sœur, je jouerai avec Poulpir-le-lapin, j’irai prendre un verre avec M., j’écouterai les projets de A. Et comme il aura manqué de me brûler entièrement, l’incendie s’éteindra.

Jusqu’à vendredi prochain.

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