Mercredi 23 octobre

« Tu sais, à un moment, il faut aussi arrêter de tous les attendre. »

Cette phrase que mon collègue E. a prononcée la dernière fois que nous nous sommes vus me trotte dans la tête depuis un moment. Pédagogiquement et didactiquement, E. est quelqu’un que j’admire énormément. Et son pragmatisme, quant à ses élèves, est souvent payant. Il est donc partisan de l’idée qu’une fois que les règles sont posées, que l’on a pris le temps d’expliquer, que le contrat, en fin de compte, est signé, il n’est plus temps d’attendre. Que c’est leur nuire, que de passer son temps à attendre les uns et les autres, à surindividualiser, à entrer dans « la pédagogie du garçon de café », comme on me l’avait reproché lors de mon unique inspection.

Et l’expérience me pousse à penser que c’est vrai. Que c’est aussi faire confiance aux élèves, et à leur intelligence, que de ne plus ralentir sans cesse la progression du cours pour attendre ce qui traînent la patte. Ils trouveront un moyen.

Pourtant, je peine à m’y faire. À m’attaquer aux éléments les plus retors de la phrase complexe quand certains peinent à reconnaître un adjectif… Peinent à reconnaître des mots tout court, lorsqu’ils ne maîtrisent pas encore le français, leur langue d’adoption. J’ai souvent en tête cette image d’une immense caravane, traversant des lieux plus ou moins hostiles, autour de laquelle les mômes trottent comme ils peuvent. Et moi, me demandant comment, et vers quoi nous avançons très exactement. Ce que chacune et chacun retirera de ce voyage, que l’institution a balisé pour nous.

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