Lundi 6 janvier

Bon.

Comment on fait déjà ?

Je sais, je fais cette blague à chaque retour de vacances, invariablement depuis dix ans. Mais ça n’est pas qu’une blague. C’est une vraie question, un véritable vertige. On s’est posé pendant deux semaines et on a pris un peu de recul. Du recul qui permet de regarder en face cette éternelle interrogation : comment, au nom de Cthulhu, vais-je réussir à apporter à vingt-six mômes tous différents, tous bourrés de contradictions, tous humains, tout simplement, ce que l’institution exige de nous et dont ils ont besoin ? Jusque là, c’était un gouffre, un abîme qui m’attirait et dont j’essayais de m’éloigner, un peu comme le Coyote, dans les dessins animés.

Et puis, j’ai repensé à cette citation qui est sans doute dans un livre de philosophie, des calendriers des Postes, mais que j’ai entendu, moi, dans un jeu vidéo, prononcé par une magnifique sorcière : « Il n’y a que lorsque tu tombes que tu sais si tu vas voler. »

Alors ouais, avoir peur, en cet énième premier jour. Regarder de façon un peu plus aiguë, un peu plus laborieuse, Valère, qui proteste comme tous les jours qu’il est fatigué. En cette année 2025, avoir encore l’énergie et l’acuité de redescendre chez l’assistante sociale pour le lui signaler. Avoir les ressources pour détourner avec joie les mille provocations à la minute de Tillie, en transformant ce qui est d’habitude une engueulade en sketch qui la fait tousser de rire. Se retrouver un peu plus naïf, un peu plus maladroit, un peu différent. Cette différence éphémère sera peut-être une chance pour certaines situations, et moins pour d’autres.

Ce prof qui ne sait plus trop comment faire, c’est une autre corde à mon arc, que je m’applique à tirer, parce que sa flèche est unique.

« Watch that moment, and when it comes, do not hesitate to leap. »

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