Jeudi 6 février

Les cinquièmes Astronelle travaillent en groupe dans une ambiance relativement tranquille – c’est à dire que le niveau sonore n’a pas encore fait frémir les murs – à préparer la mise en scène du procès de Renart. Quand brutalement, des éclats de voix :

« Monsieur, j’en ai marre, ils nous méprisent, ils se croient meilleurs que nous !
– N’importe quoi ! »

Ce qui me fait dresser l’oreille, dans cette incartade, ce sont les accents de colère et de détresse que je perçois. Des accents que je n’ai encore jamais entendu, ni de la part de Tilliam, ni de la part d’Hicham. J’arrive devant les six élèves en charge de la partie administrative du procès, et l’image est assez difficile à ne pas constater : se faisant face, trois élèves issus, comme disent si correctement nos dirigeants « de la diversité », et trois autres qui ne le sont absolument pas. Les yeux scintillent de colère et j’ai sous le crâne tous les voyants au rouge.

« Allez, on se rassoit et vous m’expliquer clairement ce qu’il vous arrive.
– Ils ne veulent pas de nos idées !
– C’est pas vrai, juste vous arrêtez pas de raconter des bêtises en même temps ! »

Une querelle d’élèves, comme ça arrive fréquemment dans les travaux de groupe. Mais visuellement, c’est trop éloquent. Est-ce que, déjà, ils ont intériorisé ces clichés que je n’ose pas nommer ? Est-ce que, déjà, le déterminisme social les a avalé, mâché puis recraché ? Et quel est mon rôle dans tout ça. J’ai le cerveau engourdi de fatigue et je reste figé. Je parviens à articuler un lamentable :

« On vous demande juste d’accomplir une tâche, avec vos forces et vos faiblesses. Personne n’a à mépriser personne, et je ne pense pas que ce soit le cas. »

Miraculeusement, ça ramène un peu de calme. Ils se remettent au boulot. Mais plus tard, je reçois deux listes de règles, chacune réalisé par une des deux factions au sein de ce groupe. Deux bouts de papier et énormément de craintes.

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