Mercredi 12 février

J’ai essayé tout ce que l’institution permet, avec Loren. Elle ne permet pas grand-chose. Loren a besoin que l’on s’occupe de lui en permanence et peine énormément à accepter la frustration ou à gérer la fatigue. Lorsqu’il est contrarié – souvent – il alignera les provocations jusqu’à ce que M. – son AESH – ou moi soyions obligé d’abandonner ou les autres élèves en situation de handicap ou le reste de la classe pour le gérer. Même les deux heures hebdomadaires où nous sommes seuls avec trois élèves, dont Loren, sont très compliquées pour ce dernier.
Il lui faut les choses tout de suite. Ce qui l’amène parfois à venir saisir les objets à même ma main ou à tenter de me tordre le poignet pour les prendre. Loren le clame souvent : il nous déteste énormément.

Et puis, le jour suivant, Loren viendra me taper sur l’épaule et me demandera si on peut faire les exercices du Lexidata. Impossible de connaître son niveau réel : il passe sans cesse d’exercices de début de CE2 à des activités de sixième. Loren a balancé à l’autre bout de la classe le roman que nous étudions avec le reste des élèves, mais lit tous les jours quelques pages du manga sur l’Iliade. Et quand, désespéré, j’ai fait n’importe quoi et acheté sur mon budget un livre dont vous êtes le héros pour qu’il tente de le lire seul, j’ai cru qu’il allait me sauter au cou. Comme la fois où il a fait un énorme câlin à M., durant le séjour d’intégration.

« Loren a développé une immense complicité avec son AESH et son professeur de français », aurait dit sa maman lors d’une réunion de suivi.

J’ignore ce que Loren développe. Ce môme est enveloppé dans un brouillard dans lequel quelques adultes errent à tâtons.

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