
Et tout à coup, il n’est plus là.
Nathan, a changé d’établissement. Comme souvent, il y a eu un message sur Pronote. Rien du tout, ni de sa part, ni le moindre frémissement en salle des profs, ou de mot de son AESH. Nathan, que j’avais découvert en début d’année et avec qui ça avait été un chemin immense. Parce qu’une journée de cours entière, c’était terriblement difficile pour lui et que le lundi, à 16h, il lui arrivait souvent de décompenser. Dans une classe compliquée.
Parce que, d’un autre côté, il adorait venir en français, et que le fait qu’il soit dispensé de collège le mercredi, pour se reposer, ça le faisait pleurer de rage. « Je comprends plus rien ! » Parce que les autres mômes n’étaient absolument pas tendre avec lui.
Nathan, avec qui on avait trouvé tout un tas de petits sentiers de traverse. Travailler en binôme avec Alanis, dont l’esprit extrêmement vif et totalement désorganisé semblait fasciner son camarade, qui écoutait ses explications, quand il n’était pas trop fatigué. Le coin près de la fenêtre où il avait le droit de faire quelques pas, d’observer. Les feuilles de dessin. L’ordinateur retapé, et ramené pour son usage personnel.
Ce ne sont pas les efforts aujourd’hui réduit à néant qui m’attristent. C’est toute l’histoire. Tous les progrès que nous avions fait ensemble, toute cette histoire. Qui, je le dis avec un orgueil insupportable, me semblait vraiment aider Nathan à se réconcilier avec l’école. Personne ne m’a demandé, à moi ou à n’importe lequel de ses enseignants, ce que nous avions fait avec lui. Un Gevasco qu’il a fallu compléter du jour pour le lendemain, ce sera tout ce qui restera de nos efforts mutuels. Nathan a disparu et la vie de la classe continue, comme si son rire sonore, sa participation ou ses moments de crise n’étaient jamais advenus. Et à ce lieu-là, ce lieu-là précisément, je sens qu’il y a une écharde, dans ce que nous enseignons aux enfants de notre rapport les uns aux autres.