Jeudi 11 septembre

Il y a des formules magiques primordiales et puissantes. Certaines, on ne peut les dire que dans des circonstances bien précises. Comme, par exemple, quand on est prof depuis plusieurs années dans un établissement scolaire.

« Oh là là, mais faut arrêter, là, vous allez être tellement plus grand que moi ! »

Ça fonctionne à chaque fois, quoi qu’il arrive : un immense sourire. Les carcasses d’ado, quelle que soit leur morphologie, se redressent et, un instant, semblent briller. En rentrant en voiture, ma playlist tombe sur la bande originale des jeux Persona. Cette série dans laquelle des adolescents apprennent à apprivoiser les forces comme les faiblesses de leur psyché pour réparer un monde souvent mis à mal par des adultes.

Pendant très longtemps, je me suis dit que c’était le rôle des adultes, de reconnaître leur échec à sauver le monde, et de tout faire pour que ce soit la génération d’après, les héros, les sauveurs, les maîtres des Persona.

Un peu moins maintenant. Parce que c’est lourd, de vouloir que chacun de nos successeurs, de nos enfants, de nos élèves, devienne Batwoman ou Superman, alors que l’on peut avoir le droit de vouloir être Alfred.

« Vous allez être tellement plus grand que moi. » Sincèrement je l’espère. Ce n’est pas – plus – un renoncement. Ces enfants et les collègues de Renais m’ont aidé à prendre appui sur ce que je suis. Et alors que je vois à quel point mon existence d’enseignant et d’être humain est immense, je ne peux que souhaiter que la leur le soit plus encore, que jamais leurs mondes intérieurs ne cesse de grandir.

Comme le dit la chanson qui tourne en boucle dans l’habitacle : « Wake up, get up, get out there. »

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