Mercredi 3 mai

“Tu as la peau dure.” m’a dit quelqu’un aujourd’hui. Il parlait littéralement. Il voulait dire qu’apparemment, je n’ai pas la peau particulièrement sensible aux piqures, pincements et autres griffures. C’est un fait.
Ça m’a fait rire, parce que, sans le savoir, cette personne a identifié ce qui explique ma présence prolongée dans l’enseignement, et le plaisir que j’y prends.
Je ne suis pas un professeur différent des autres. Je n’ai pas le talent oratoire de mes collègues les plus éloquents, le génie pédagogique de ceux qui préparent des projets fabuleux ou la rigueur intellectuelle des plus érudits.
Mais j’ai de la résistance.
Que ce soit lors de mes premiers jours, quand je n’avais encore rien à faire dans ce métier, et que je rentrai mortifié de ce que j’avais proposé. Que ce soit quand les cours se sont mal passés, que je sois en conflit ouvert avec une classe, ou qu’on me balance du jour au lendemain un niveau que je n’ai jamais eu (les joies du TZRiat), j’y vais.
Ça n’est pas un super pouvoir ou une source de fierté. Je sais juste mettre un pied devant l’autre. Peut-être que sans cette caractéristique, j’aurais fait comme T., et j’aurais changé de profession. Peut-être que j’aurais demandé une mutation ailleurs, que j’aurais, comment dire, mené ma carrière avec davantage d’ingéniosité. Est-ce avoir “bien mené sa carrière” d’enseigner en tant que remplaçant dans un collège que l’on n’a pas choisi alors que l’on a quarante ans ? Je l’ignore. C’est ce que je fais.
On n’est pas trop sensible, quand on a la peau dure, c’est sans doute un problème, ça empêche de saisir des opportunités, ou de se mettre dans le sens du vent.
Mais on avance.